Parfois, on fait des choix étranges : comme celui de ne pas investir des champs qui vous semblent inaccessibles. Je pense notamment à ces activités artistiques, qui, lorsque votre enfance ne vous y a pas baignés, s’écartent volontiers de votre route. Entre l’enfant qui grandit dans les livres, la peinture, la musique, que ses parents emmènent partout et celui qu’un cercle plus restreint accueille, il y a un monde et en même temps, aucune différence notable. Lorsque j’étais enfant, moi qui appartient plutôt au deuxième cercle, je me suis dis un jour que rien ne devait nous être interdit ; Et qu’il fallait franchir la porte de tout ce qui pouvait être investi. Alors, apprenant seule dans mon coin, j’ai commencé par exemple à dessiner mes propres BD, mes histoires, à faire dialoguer des univers, tout en cherchant du coin de l’oreille les musiques que je n’entendais pas si facilement. Et puis, le temps a passé, comme il passe pour tout le monde, et certaines activités, d’autres apprentissages ont parfois pris le pas….avec plus ou moins de succès d’ailleurs, mais l’important n’était pas là. Ce qui comptait était la passion réelle, le bonheur, le plaisir quasi tellurique qui préexistaient à agir, à oser. Et les passerelles que ces investigations diverses dressaient entre les choses, au lieu de sérier, compartimenter, segmenter, ouvrant un grand angle dans ma tête, jamais assez grand d’ailleurs, mais qui m’a rendu invivables les espaces clos…
Aussi, et bien qu’ayant mis un temps formidable à me décider, j’ai racheté il y a peu quelques fusains et crayons, un petit bloc de dessin et je m’y amuse à faire quelques mauvais crobars, sans talent, mais je m’en moque ! Ce contact, ces essais bredouillants, ces pauvres résultats après une heure d’efforts où je tire la langue comme une écolière un peu baroque, relient des mondes qui n’en sont qu’un : celui où le passé, les patrimoines culturels, les techniques et les maîtres se diluent dans le présent pour mieux dessiner un avenir ; celui qui me dit que les modernes outils d’aujourd’hui, le numérique, le digital, les logiciels supra performants, n’en restent pas moins les outils de l’esprit en mouvement ….et que tout ça fera bouger, évoluer les images que j’ai en tête et peut-être nourrira un langage un peu plus charnu et goûteux !!! Alors, je pose ici ce petit croquis si maigrelet, si convenu sans doute, premier pas, B A ba malhabile d’une énorme envie de faire qui ne veut aujourd’hui s’arrêter à rien …