Le ciel est vendangé d’humeurs farouches, rincé d’huiles et d’exhalaisons violentes. La ville parle d’absences : ses trottoirs lavés de pluie portent les traces nostalgiques des derniers pas qui se sont tus….Dans le petit parc, la balançoire baille aux corneilles et les tables de jeux sont désertes. Un grand silence règne, si inhabituel qu’il vous transporte dans un décor de survivance, ravage à Barjavel, frissons vespéraux du dimanche qui se couche plus tôt que habitude sous l’appel de la pluie….
J’aime ces grands pans de solitude, l’ennui feutré suintant des volets clos sur la chaleur aoûtienne, les voitures qui prennent la poussière le long du trottoir, et celles, rares, qui semblent regretter la multitude, et s’engagent à vitesse lente dans des artères pourtant vides….
Le pas résonne au milieu des rues populaires, petitement pavillonnaires ,que les chats envahissent hardiment, quelques roses exhibent languissamment leurs atours défraichis, leur grande soif de délaissées dans les jardinets où trainent quelques jouets. J’imagine, à la terrasse fermée du petit bar du coin de la rue, quelques silhouettes ventrues, penchées sur leur dernier pastis, ou un couple d’amoureux féroces, uniquement occupé de lui… La ville, l’été, n’est pas si loin des grandes plaines, où le vent s’engouffre sans obstacles, et chante ses complaintes de cow-boy….
Et moi, je marche doucement, pendant que des fantômes blancs, derrière des vitres aux rideaux sales, guettent le retour des absents….