Avons-nous jamais eu aussi peur du temps ? Même en sachant que celui-ci ne passe pas, il boucle, ou ondule ….le saura–t’on vraiment jamais ? Avons-nous autant expérimenté l’obsolescence qu’en ce siècle, où le délitement programmé des objets semble accompagner une autre forme de déliquescence, celle de l’intérêt vrai ? Fi de la permanence, de l’enracinement, au profit d’une soif dévorante de consommation d’idées, de mots, d’images, de modes, de gens, de….tout !
Est-ce que ce temps que nous nous obstinons à compter corrode ce qui en nous veut justement le prendre … ce temps ? Celui de savoir ce qu’on veut, et ce qui nous déçoit lorsque nous projetons autour de nous comme des faisceaux gourmands, d’avides regards…
Peut-être restons-nous des enfants, propulsés dans l’instant, dans la jouissance nécessaire, addictive du tout, maintenant, tout de suite, là ? Dans le refus du défaut, de l’imperfection, du réel …ou de ce qui en fait office, peu ou prou ?
Regardez sur la toile, le ballet des like et des désenchantements, des abonnements compulsifs et des abandons récurrents, pour une lassitude, une incompréhension, un zapping du moral et du mental. Regardez dans la vie, ces êtres tant aimés, ces amours de toujours, ces amitiés indéfectibles, ces serments, ces engagements politiques, étiolés, hagards, décolorés et titubant….mais, où est donc la frontière entre les changements nécessaires, la maturation, le recul, et l’inconstance ?
Je te regarde et je te lis, et dans ce geste, mon attente est impatience, exigence et volonté ! Non, je ne te donnerai pas un autre temps, une autre chance ! Si tu ne me séduits pas, ne me convaincs pas, j’abdique ! Et bourdonne vers d’autres fleurs comme une abeille intoxiquée qui ne sait même plus quelle variété elle veut prendre ! Et butinera de toute façon, pourrait-elle s’en passer ?
« L’être d’un être est de persévérer dans son être »….c’est Baruch Spinoza qui l’a dit, et cela me questionne, toute une vision en abîmes dans ces quelques mots…..persévérer dans son être, qu’est-ce que c’est ?
Opposer, dans cette démarche fondatrice, nécessaire, la constance, l’assise, les fondations du temple et le mouvement de la pensée, les changements inéluctables, le processus de vie et de vieillissement….le choix….un choix pensé, réfléchi, quelquefois pérenne, d’autres, pas….ou ce qui, touchant nos impulsions et compulsions redoutables, nous commandite alors même que nous pensons choisir librement ?
Entre ce que je veux maintenant, de toutes mes forces, ce qui me secoue, m’accroche, et ce que j’en sentirais, penserais tout à l’heure, dans 1 an, dans 10 ans, quelle bribe de réalité restera-t’il, qu’est-ce qui là dedans, vaut la peine que je m’assieds un instant, que je prenne le temps de goûter, de revenir en arrière, de chercher ? Est-ce que dans ce monde fictionnel, où se retouchent sans fin les corps, les paysages et les concepts, où l’ »être soi » prôné partout est surtout, être comme les autres souhaiteraient vous voir, comme vous-même souhaiteriez que les autres soient, il reste une nano particule de sincérité ?
Je le crois…et le croyant, je m’oblige à éteindre tout, parfois. A me poser dans le non agir, le non penser, le non regard. A laisser le « rien » me traverser…me rincer…et à m’autoriser alors de nouveau ma propre vision subjective de la réalité, entre constance, rémanence et permanence de mes choix fondateurs, et l’insoutenable légèreté de Kundera….
merci … de ce moment d’intelligence dans ma pause-matinée-facebook-au-boulot …. ;o)
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En vérité, le plaisir est partagé! Merci de ta lecture !
Amitiés Françoise
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Justement, je n’ai pas le temps de te répondre 😀
Sincèrement, j’adore tes articles et te lire est une joie toujours renouvelée.
Et j’adore Milan Kundera…
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Bonjour Elisabeth
Tu finiras par faire rougir mon front ! Mais ce sera un rougissement de plaisir, que je ne bouderai pas ! Et j’espère que tu auras…..le temps, de répondre àce sujet, tes remarques étant toujours fondées et intéressantes.
merci, Elisabeth !
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Ton front, ma chère ? Ne serait ce pas une licence poétique ?
Cette phrase sur le temps était une sorte de boutade, pas très réussie, en occurrence 😀
Je reviendrai, sois en sûre, ton boudoir est si accueillant… comme si tu tenais un salon littéraire du haut vol…
Doux souvenir de l’époque où on savait prendre son temps…
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Bonjour Elisabeth
,
Si si, je l’ai bien prise comme telle ! Mais ne pouvais pas manquer l’occasion de souhaiter revoir tes propres mots !
A bientôt!
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