Le cœur de la ville bat à 38 degrés Celsius ; le jardin clos sur son sommeil de 16 heures étuve doucement. Les fleurs sont pâmées, couchées, exhalant leur senteur exacerbée. Sous le grand arbre, la petite table du jardin brûle les doigts. L’air est triomphant, bleu comme un drapeau, éclatant comme un rêve. Ma fille, mon fils et moi , nous jouons, renouant avec la tradition d’enfance qui leur faisait préférer n’importe quelle partie de carte endiablée, et ces longs jeux de stratégie où les forces alliées venaient à bout de sorciers et de trolls maléfiques pendant que le jour n’en finissait pas de s’éteindre, à quelque console de jeu solitaire. Dans mon cou, perlant sous les cheveux longs, la sueur coule lentement, s’insinue sous chaque pli de tissu, rend insupportable le moindre mouvement, le plus petit contact. Des parfums de framboise et de lys entêtent et grisent, les pensées chiffonnées se couchent pétales pliés. Les chats d’Emilie, postés comme des vigies derrière nous, semblent fixer leurs yeux d‘agate sur chaque mouvement. Leur posture de sphinx impénétrable sont une réponse provocante à mon avachissement, la courbe de mon dos épousant sans vergogne le rigide dossier de fer de la chaise de jardin, les jambes écartées en posture de cow-boy et sans la moindre élégance ; Que ne donnerais-je pas pour une goutte d’eau, une gorgée de la bouteille oubliée quatre étages plus haut et qu’une torpeur sicilienne, un enlisement m’empêchent d’aller chercher !
Une voix, une ombre à contrejour dans l’encadrement de la porte. Précédée de sa garde prétorienne, Emilie fait son entrée côté jardin. Sa silhouette toujours robuste, son port de tête néronien dessinant sa ligne fière sur l’herbe couchée. Dans sa main, une de ces assiettes de faïence fleurie qui parlent d’été éternel. 6 fruits miraculeux y reposent en offrande : 3 pêches veloutées dans leur robe fraîche et leur divine couleur pourpre et dorée, 3 abricots dodus et gourmands à souhait. Emilie est fatiguée. Ses traits sont tirés, un peu, et je note le pas droit hésitant et plus lourd, qui marque une seconde d’arrêt à chaque enjambée. Mais je note plus encore ce sourire éternellement maternel, connu de tous les enfants, celui du gâteau qu’on a fait pour vous, du goûter préféré qui trône déjà sur le buffet en attendant votre retour. Du livre qu’on vous a acheté en cachette rien que pour vous et dont personne d’autre que vous ne peut apprécier la saveur. Qui reste ancré dans la mémoire si longtemps après. Cet inestimable trésor qui vous parle d’amour sans que le moindre mot ne soit prononcé.
Les pêches d’Emilie ont bien plus que la saveur du fruit défendu : cet incomparable arôme de l’attention portée. Bijou précieux dont je me suis parée, bien vite, après un baiser sur sa joue, et ma main sur son bras satiné…
Vous m’avez donné soif dites-donc ! 😉
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Une petite occasion de boire à sasiété alors! :)!
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J’adore!!!.Bravo y olé !!!
Quelle description plus belle…
Énorme bisous.
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Merci Barbara, je les partagerais avec dame Terpend !
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