Soixante-six, soixante-sept, soixante-huit,soixante neuf secondes
C’est le temps que je suis restée à regarder le ciel
C’est long
J’ai compté tête levée, les pieds nus dans l’herbe
l’herbe du jardin en bas,
aussi douce quand le décor disparaît aux alentours de minuit
que l’herbe qui pousse n’importe où, ailleurs
J’ai compté à la manière des enfants
qui chantent souvent bouche close
des secrets que les grands ne comprennent pas
J’ai compté pendant que le ciel glissait ses longs cheveux
autour de moi, que les étoiles chutaient sans bruits
une à une dans mes yeux
J’ai compté pendant que mon corps s’éveillait à ce grand plein
Rumeurs, bruissements, soupirs
Cet infini, ce ruban d’encre, j’aurais pu en emmailloter mon corps
jusqu’à ne plus pouvoir bouger un cil
jusqu’à devenir moi-même matière noire
Mais j’ai compté
Soixante-huit, soixante-neuf
Et lorsque je me suis tue
le baiser de la nuit a dévoré ma bouche
et tout a disparu