Se prétendre correcteur est une manifestation d’orgueil incroyable, je le sais, mais il a bien fallu trouver une appellation assez signifiante à mon exercice. Et un titre qui s’intègre dans la nomenclature officielle et peu poétique de l’INSEE. Née du hasard et de l’amour que j’ai du langage sous ses hardes diverses, ce métier en tout cas est devenu à peu près le mien ; je dis à peu près parce que justement, ce costume-là n’est jamais taillé sur mesure ; il prend ses aises, il godaille au rythme de l’histoire, de mes propres apprentissages, des réformes et des usages. De mes erreurs aussi. Ni grammairien, ni linguiste, le correcteur reste un besogneux et un élève toute sa vie.
Accompagnateur en écriture serait peut-être mieux ajusté mais cela serait par trop vague. Quant au terme coaching, j’avoue l’exécrer d’autant qu’il sert à tous usages, et pas forcément les plus honnêtes selon moi. S’ils n’étaient si dépréciés, j’userais des mots artisan ou ouvrier des lettres, et pourquoi pas, petite main. Celle qui vérifie le vêtement passé sur le mannequin, taille, coud, ornemente parfois, et puis disparaît. Celle qui sait aussi qu’un vêtement n’est jamais parfait ; la langue non plus.
Néanmoins, quel que soit le titre qu’on voudra bien me consentir, mon cap reste identifiable : rendre le sens de ce que je corrige, clair, agréable à lire, précis. L’adapter au référentiel de langage que le sujet concerne, tenter de coller aussi à l’usage le moins polémique, avec, il faut donc l’avouer, un conformisme obligé.
Ne pas se réjouir de devoir lire n’importe quoi sur à peu près n’importe quel support de nos jours, ne doit pas être pris comme une manifestation réactionnaire aigue. Mais comme une vigilance certaine pour que le sens ne se perde pas, ou le moins possible. Tout ce qui est source de confusion altère la portée d’un argument, égare le lecteur et lui fait perdre du temps. Tout ce qui est verbiage alambiqué, périphrases boursouflées, ne cachera pas la maigreur du fond à qui vient lire de plus près.
Aussi la correcteur est-il peu ou prou le gardien d’un temple bien contestable, dont les colonnes tiennent plus de la pierre friable que du marbre. Mais c’est aussi ce qui le réjouit souvent : remettre l’ouvrage sur le métier et sous la loupe, il connaît cela par cœur ! Craindre constamment l’oubli, la coquille, la fatigue de la mémoire et des yeux et les limites de ses connaissances, aussi.
Ce pourquoi dans ce métier très peu reconnu, auquel on ne forme plus vraiment et c’est dommage, on ne saurait être prétentieux : rester dans l’ombre d’une phrase vous oblige à essayer de faire mieux.
Non, Phédrienne, il n’y a pas d’orgueil à se prétendre correcteur. Bien au contraire c’est un noble et humble métier incontestablement utile et dont la disparition progressive se fait de plus en plus sentir dans ce que l’on lit dans la presse et dans de nombreux livres, même s’ils sont produits par les meilleures maisons d’édition. Alors, correctrice vous êtes, restez-le et fière de l’être. Néanmoins, sans malice de ma part, permettez-moi d’être aujourd’hui votre « correcteur » ! On ne remet pas le métier sur l’ouvrage… mais l’ouvrage sur le métier. Vingt fois selon le bon Boileau, et jusqu’à cent fois dans de nombreux emplois approximatifs de cette expression ! Vous qui écrivez si bien et si juste, vous ne m’en voudrez pas, j’espère, de cette incursion dans votre texte que j’apprécie. Amicalement, Jean-François Mathé
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Bonjour Jean-François, bien heureuse de vous retrouver ici !
Je ne vous en veux pas, bien au contraire et vous remercie. Où ai-je la tête, parfois, je peux me le demander ! Et du coup, je ne vais pas me remettre à l’ouvrage, ce texte prouvant que pour l’heur, je suis bien fatiguée ; je vais donc aller muser un peu au soleil.
Merci pour votre lecture attentive et vos encouragements. Je m’interroge de fait beaucoup sur l’écriture et la correction en ce moment.
Amitiés.
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Bonjour, le hasard de ma recherche spontanée autour des métiers de l’écriture m’amène à découvrir votre site. Très riche. je n’ai parcouru que quelques extraits. Je suis passionnée d’écriture. Je me surprends à l’écrire ainsi. A l’heure d’un grand tournant professionnel, pourquoi ne pas utiliser cette compétence? me dis-je aujourd’hui même. Je ne sais toutefois pas par où commencer ni démarcher. Pouvez-vous me conseiller? Merci
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Bonjour Sylvestre
Je crois que votre première démarche doit consister à savoir quelles genres de prestations vous avez envie et êtes en capacité de faire puis de cibler le type de personnes avec lesquelles vous pourriez travailler pour définir une offre. Ensuite, d’étudier ce qui existe déjà dans votre région, pour vous positionner. N’hésitez pas à consulter les pépinières d’entreprises ou la chambre des métiers pour trouver le statut qui vous conviendra et à sonder votre carnet d’adresses professionnel et personnel pour savoir qui pourrait être intéressé.
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