Si tu étais parti au-delà des mers
des côtes, des rochers, des plaines, des forêts, des terres
des montagnes et même des banquises
Loin, le plus loin, là où même le pas de l’ours s’ignore
et si je t’écrivais
Que cette missive mette des mois, non, des ans peut-être à te parvenir
Que te dirais-je ?
Je pencherais mon front pour toi sur le papier
Je fermerais la fenêtre sur le bruit
J’ouvrirais la porte aux images et aux rêves
Je prendrais le temps, oui, crois-moi, je le prendrais
Je quitterais l’immédiateté, j’oublierais l’instantané
Je me dépulsionnerais, je quitterais ce siècle brutal
Je puiserais aux astuces du temps
Je réinventerais ta voix, tes gestes, nous
Et cela coulerait comme un ru tranquille
serpentant en creux de prairie
j’userais des mines, je prendrais du ciel
de l’herbe, du vent, et je t’écrirais
longtemps, longtemps, longtemps
pour que cela devienne rivière et océan
déroulant jusqu’à toi, par delà l’oubli
les rondes et les déliés de nos corps
mon souffle, ma buée d’âme jusqu’à toi
si tu étais parti là-bas …