Ce n‘est pas la vie qui te passe à l’égouttoir du temps
qui essorille tes ardeurs
qui te tamise à t’étouffer
qui te remet le doigt à la couture du destin
Non
C’est lui, moi, l’autre, eux, nous
qui enfermons dans des registres
des agendas
des calepins annotés
qui attendons de tous
d’être à la ligne
En rang, à la file, à la queue comme tout le monde
debout, en garde, garde-à- vous, gare à vous, gardez tout de vos envies
Silence dans ce rang où vous n’avez plus l’âge de balbutier
d’être mal coiffé, ongles endeuillés, ventre à l’air
et puis quoi encore ?
Ce n‘est pas la vie, elle s’en moque, elle s’ennuie
de ce que nous n’osons pas
Elle se toque de plus d’ambition que cela
Ce n’est pas la vie qui te remise à ton rôle
fille de, femme de, mère de,
et femme seulement ?
Qui te dit de t’assoir jambes serrées dans le métro
qui te dit d’acheter ton pardon à la clémence des autres
Non
C’est une fatigue, un tiraillement de rênes à la commissure de ton gré
Pourtant
Il va bien falloir l’épouser, elle, la vie
sa chair, son aire, son omnipotence
Il va bien falloir y aller
Poème juste et beau sur les raideurs, les rigueurs que la vie et nous-mêmes nous imposons. J’y pense souvent. Mais je pense souvent aussi à cet aphorisme du poète belge et surréaliste Achille Chavée : « Je suis un vieux peau-rouge qui ne marchera jamais dans une file indienne. » Une incitation à marcher de travers et à mettre un pied, les deux si possible, dans l’espace de la liberté.
Amitiés, Jean-François
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Bonjour Jean-François, heureuse de vous retrouver ici. Ma peau blanche a, paraît-il, quelque chose à voir avec ces marcheurs de travers. Merci pour cette jolie référence. Amitiés.
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