J’avais un ami qui aimait les poissons
tout ce qui portait nageoire était pour lui
supérieur aux passions
dont d’autres auraient tiré gloire
Le jour il était chef de gare
la nuit il prenait hameçon, canne, filet, et saucisson
et se mettait en faction
sous l’œil de gros hannetons
Un autre empilait des soldats
plus petits qu’une phalange
les peignait un à un, les mettait en légions
sur les étagères de sa maison
Un autre encore peignait des femmes encordées
ficelées de belle façon
ligotées de la tête au tronc
avec leurs seins de sirène
Il y en avait plein son salon
Et moi qui ne sais rien faire
à part laisser les mots partir
dans ma bicoque où le vent sème
un peu de fantaisie au pire
je ferais bien une collection
de soupirs, du silence à la pâmoison
je ferais bien un tas de frissons
un tas de grâce docile
pour les jours où la colère
me monte au front
J’aime ce poème à l’humour délicat, moi qui comme vous ne suis pas collectionneur. On pourrait le penser à voir le nombre de livres amassés sur mes étagères, mais cela n’a rien à voir avec la passion de la collection. Ils sont venus là, un par un, coup de cœur après coup de cœur, sans savoir qu’ils constitueraient un ensemble. Ils ne sont pas des objets (je ne suis pas bibliophile), mais des êtres vivants qui laissent ou ont laissé partir leur mots vers moi. Mes préférés me parlent encore même fermés et me montrant leur cul sur les rayonnages. Pour conclure, je suis même trop timbré pour être philatéliste !
En pensant bien à vous, Jean-François
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J’ai longtemps nourri des rêves de bibliothèque, mais je les ai abandonnés. Je préfère de beaucoup l’idée d’un livre voyageur et d’un lecteur qui ne se sépare jamais de la vie, ni de la sienne ni de celle d’autrui. A bientôt Jean-François.
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