Sur les bords du Rhône
le chemin est vertueux
bitumé, bancs carrés,
les chiens s’y mènent sages
Les trailers déroulent, écouteurs glissés
dans l’étroit pavillon de leurs oreilles,
leur compte de kilomètres
Les vélos sonnent au passage
les marcheurs au pas cadencé
une deux, une deux !
Chaleur cerclée autour de la nuque
lointains flonflons du manège
qui fait tourner les enfants du fleuve
sur son dos
Mon pas s’allonge, ma tête
résonne de mon cœur-forge
qui tient le rythme
de mes poumons qu’un vent d’orage
assèche
Sur ma droite, la ville stridule
ne s’arrête jamais
Sur ma gauche d’antiques troncs moussus
racontent la décadence de Rome
les gônes joueurs dans le fleuve interdit
l’île aux castors, les saules pleureurs
le barrage affolant les eaux
Je continue, ma marche narcotique
fait danser les fourrés piquetés de violettes
et de fleurettes minuscules que personne ne regarde
Un camp de manouches d’où jaillissent des mioches
au regard braisé d’envie
aligne d’impeccables et énormes poubelles
remplies jusqu’à la gueule
les cyclistes accélèrent à cet endroit
les coureurs, coudes collés au buste,
allongent la foulée
c’est le lieu du mystère et du danger !
Je ne cours pas, je marche
une deux, une deux
toujours du même allant
un mince ruisselet colle
mon t-shirt à mon dos
la ville se rapproche
de toute sa laideur
Enfin le talus crache
son flot de voitures sales
et le Rhône se tait, vaincu
Tout au bout
avant les toits
les parkings
le mâchefer
les cages
princesse solitaire
l’orchidée me salue