J’ai un tout petit os coincé dans ma cervelle
dans un quartier perdu du nord
Cela fait des semaines qu’il pousse sa ramure
et s’appuie vivement sur ma mémoire molle
qu’il enroule ma langue et clôture en lieu sûr
mes mots joyeux
Ce sont des mains, une ombre, un chemin herbeux
des pierres arrimées à bat-flanc de coteaux
des vignes amoureuses, l’envol d’un cerceau rouge
autour de mes hanches
C’est l’histoire qui n’a pas vécu et la liberté sidérante
qui tout m’a coup m’est échue
celle que je cherchais dans les pages d’un sourire
Nul ne m’a appris lorsque j’étais enfant
à grandir moins vite, à prendre ce très longtemps
de la rencontre avec soi-même
Le petit os me retient encore un peu par le col
en bloquant dans ma tête ces grands flux
qui font couler l’audace, la pugnacité, l’envie
Il me fait mal comme si je m’accouchais de moi-même
très férocement alors qu’il suffirait de m’abandonner
Je me devais de regarder mes neurones miroirs
qui montrent que moi seule peut ôter
le petit os que j’ai sottement planté
sans y prendre garde
(introspection dominicale)