C’est un peu délicat de parler de soi en ce moment ou de denteller des mots
histoire d’habiller ce trop-plein de temps passé tout seul
Alors j’ai pris ce moi avec des pincettes, et je le fais tremper dans l’eau salée
Je le sable d’un peu de poussière violette, je le sucre, je le peins, je le jette sur un dossier
Sur le bord de ma fenêtre où je le laisse sécher
Je me sens comme d’un livre dont les personnages échappés
se sont tous mis à voler vers une planète oubliée
Un cheveu en marque-page, un coin corné sur la page
Et j’écris avec mes doigts sur la poussière de la table
Je fais un cœur en mie de pain qu’une corneille guette au loin
sur un grand marronnier affable
Je pense à l’ami qui dort dans son grand lit d’hôpital
Je pense à tous les trésors enfouis dans la plage de nos crânes
Sur ma fenêtre des rubans, verts et joyeux claquent au vent
Je m’y nouerai comme faveur, pour que le soleil fasse demeure
Dans chaque brin de ce tissu, dans chaque mot doux qui s’est tu