Apprendre

Une fois la porte franchie

Derrière le ruban rouge

Ses battants lourds et obscurs

Occultant le jour et toute lumière

Nul ne savait ce qu’il adviendrait

 De son petit

Chacun mobilisait sa mémoire

Et fermait un instant les yeux

Je regardais sans mot dire

Et me revenaient des fragments

Des tessons de passé hachés

Et incertains

C’était difficile

J’avais dans les mains une photo

 Où une enfant ronde avec

Des yeux en assiette

Noirs, brillants, nullement effrayés

Surplombaient un sourire éloquent

Je n’avais donc pas eu peur ?

Je ne me souvenais pas de ma mère

Était-elle là, à mes côtés, ?

Mais je revoyais, nets et tranchants

Les tables et les chaises rondes

Les ardoises et les craies

Les livres !

La porte se referma

 Sur une maîtresse masquée

Suivie d’un très petit nombre d’enfants

Certains parents au compte-goutte

Entrèrent également

Nous autres recourûmes

À la technique des chenapans

Et des « écoles-buissonniers »

Le nez écrasé à la fenêtre

 partagés entre curiosité et envie

nous regardâmes s’égailler

les enfants, se tendre les mains

s’ouvrir les yeux

Était-ce bien, était-ce mal ?

L’automne appelait des jeux

Des fouillis de feuilles

Une jaune clarté

La liberté !

Alors me revinrent

Le goût de ma première journée

Et l’ombre d’une femme brune

Que j’avais passionnément aimée

Car elle m’avait donné le goût

D’apprendre

A propos Phédrienne

Je suis ce que j'écris, ce que je vis, et réciproquement, cela suffit sans doute à me connaître un peu :)
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3 commentaires pour Apprendre

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