J’aimerais avoir la fierté et l’honneur de célébrer les bras
Qui creusent près de moi une énième route
J’ai hérité fort bien d’un cortège de doutes et de certitudes
Qui classent sur une échelle bien des tâches et des gens
Aurais-je, moi, le courage, sous un soleil brûlant
De casser de la pierre, de goudronner, d’extraire dans des seaux
Les humeurs de la terre, d’excaver à grands bruits
Un tunnel obscur où bientôt grondera un train sans soleil ?
J’ai grandi éperdue d’amour devant la main qui crée
Oublieuse du travail qui tanne celle des autres
Et aujourd’hui, je me sens légère et délestée
De toute admiration frileuse car me revient
L’humaine condition qui du plus humble au plus intelligent
Nous habille de même de grandeur et de petitesse
Je voudrais pourtant avoir du génie comme d’autres rêvent d’or
Et grandir de ce que je ferai grandir chez d’autres
Mais je n’ai dans ma main qu’un tout petit crayon
Et une volonté à peine plus tenace qu’un pétale de fleur
Je n’admire plus celui qui écrit mais j’aime lire encore
Car de la parole naissent des mondes qui
M’apprennent à regarder sans peur