Le dimanche, quand il pleut, je fais des crêpes, j’écoute de la musique, je cire mon parquet,

j‘essaie de dessiner en tirant la langue et en fermant un œil, des fois que je verrais mieux la perspective.  Parfois j’appelle des gens, mais rarement, les gens n’ont pas le temps le dimanche, le dimanche c’est fatigant,  il faut faire des activités qu’on n ‘a pas le temps de faire autrement, c’est important. Le dimanche, je rêve d’ailleurs, d’ailleurs cela m’arrive souvent. Un jour, je saurai ce qu’il faut faire et où aller mais pour l’instant je reste prisonnière de mon manque d’envie, le dimanche, c’est un jour en képi qui t’ordonne de faire comme si tu aimais ce jour-là. Le dimanche, j’entends mon voisin se moucher très fort le matin, c’est un rite, il  se mouche, il barrit trois fois pour saluer le jour et quand il a de la visite il bourdonne toute la journée et parfois cela m’énerve et je luis dis tais-toi, ce qui est d’une rare incivilité, mais que voulez-vous le dimanche, je suis une sauvage, une brute sans aménité. Le dimanche, parfois, mais rarement, je pleure, cela me redonne un peu d’humanité, je pleure sur les petites trahisons et sur les fleurs qui ne poussent pas, sur le fils que j’ennuie, sur une musique qui me tord le ventre, c’est un peu mièvre, mais j’aime mieux cela que de ne pas pleurer du tout, je ne suis pas un caillou, quand même !

Le dimanche, je marche dans le vent, hier il était entêtant et s’enroulait autour de vous en semant de petits frissons dans votre cou.  J’ai  croisé un seul homme, les mains dans les poches , qui m’a dit « bonjour » avec l’espoir des solitaires, je lui ai dit « bonjour ! » pour que ça nous donne chaud. Le dimanche ne se termine jamais trop tôt.