Ce matin, j’ai plongé mes doigts dans la terre, j’ai, comme on dit, jardiné, maladroitement ; la terre s’effritait entre mes doigts, poudreuse et légère, elle sentait la poussière et le chaud. C’était une façon de revenir vers moi, de recommencer à habiter un corps en déshérence ; ca fait des mois que je vis un peu à côté de moi, comment vous expliquer cela : le monde que j’habite est très éloigné du réel et peine à y trouver ses marques. Alors je me suis exilée dans ma tête, dans les lignes, les miennes et celles des autres ; J’ai acquiescé poliment à des sujets pour moi sans importance, j’ai écouté le monde se mentir, continuer de se mentir à lui-même, j’ai écouté mon propre silence, en faisant mine de croire que rien n’avait changé.
J’ai promené sur les quais, le long des rues, ce double endormi, cette Ophélie prostrée sur son lit de rivière, et son regard couché. Je n’ai pas pleuré et ce n’était pas bon signe : le chemin des larmes est aussi un creuset où se faufilent certaines vérités. Moi, je commençais à tarir, à me désertifier ; je n’avais plus de colère et d’aucuns auraient pu admirer ce semblant d’équilibre soudain : tiens, l’enragée Colette, le petit animal têtu, la rebelle est enfin devenue sage. Mais non, indifférence n’est pas sagesse…Il y avait le moi travaillant, fidèle et zélé, performant et puis l’autre, le somnambule de plus en plus pesant…
Il a fallu le son d’une voix chantant, un creux émotionnel soudainement parti du ventre pour qu’enfin le printemps me réveille de ce long hiver, de ce mauvais désenchantement. Et comme un ours sortant de sa tanière, je recommence à sentir le vent, à m’irriter, à m’impatienter, à me fâcher. A m’enthousiasmer sans autre raison que ma sauvage subjectivité . Toutes choses qu’on n’aime guère par les temps qui courent mais je préfère courir après mes émerveillements qu’après mon sommeil…pas vous ?
Moi aussi, je préfére courrir aprés mes émerveillement… Trés belle article, Phédrienne.
Bisous
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Cela ne m’étonne pas du tout de toi, chère Barbara ! Merci et bisous !
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